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Politiques publiques - Au niveau départemental -

La Réunion (97) : une action pour les femmes victimes de violences conjugales

Une enquête statistique comme appui à la mise en place d’un plan d’action : l’ENVEFF-Réunion

Le plan d’action contre les violences faites aux femmes à La Réunion a été suscité par l’ENVEFF. Cette enquête menée en 2000 en France sur les violences faites aux femmes, a aussi été menée sur le département de la Réunion. Les résultats ont fait voir, chiffres à l’appui, à quel point la problématique des violences faites aux femmes était importante à la Réunion.

L’indice de violences conjugales à la Réunion est de 15% par an contre 10% au niveau national ; et le taux de mortalité des femmes suite à des violences conjugales est absolument terrible.

La Réunion compte 700 000 habitant/es. Quand on transpose avec des calculs de statisticiens, le niveau de dangerosité auquel les femmes sont exposées, on a chaque année 10 000 femmes en danger grave ou extrêmement grave, c’est-à-dire dans un risque d’atteinte à leur vie et à leur intégrité physique.

Les chiffres ont permis d’avoir un interlocuteur Etat plus réactif.

Partenariat entre l’Etat et le Département

La lutte contre les violences faites aux femmes fait partie des priorités du volet social de la politique départementale. Comment cela s’applique-t-il ?

Le département a inscrit au sein du PDCS l’action contre les violences faites aux femmes. Il a signé un plan départemental de cohésion sociale avec des fiches actions bien précises sur la lutte contre les violences faites aux femmes, un échéancier, les moyens humains et financiers pour la mise en œuvre.

Le Plan Départemental de Cohésion Sociale fait écho au Plan Départemental de Cohésion Nationale porté le ministre Jean-Louis Borloo. Un partenariat étroit a été mis en place entre l’État et le département. Ce qui veut dire qu’au niveau de la Commission départementale d’action contre les violences faites aux femmes (CODEV), il y a une co-présidence entre l’Etat, représenté par le préfet, et le Département, représenté par la présidente du Conseil Général. La Réunion est probablement le seul département à avoir adopté ce système de co-présidence.

Un dispositif d’écoute téléphonique unique

L’Etat et le Département ont mutualisé leurs moyens financiers et leurs moyens humains. Comment cela se traduit-il ?

Un seul dispositif d’écoute téléphonique pour l’enfance maltraitée et les femmes victimes de violences a été mis en place : le 115 qui fonctionne 24 h/24 et 7 jours/7.

En 2005, ce dispositif a reçu près de 19 000 appels, autant pour des enfants victimes de violence que pour les femmes victimes de violences qui n’osent pas parler et qui ont là une écoute anonyme et une information sur qui contacter et comment.

Pour gérer ce dispositif téléphonique, une équipe permanente a bénéficié d’une formation d’écoute téléphonique. Il y a aussi un psychologue sur place. Cette équipe sera renforcée dès 2007.

Accompagnement, hébergement et relogement

Il existe aussi un partenariat avec des taxiteurs et des hôtels ou pensions de famille sur toute l’île qui ont signé des conventions avec le Conseil Général, et qui travaillent en collaboration avec des travailleuses et travailleurs sociaux en astreinte - sur volontariat - au Conseil Général.

Concrètement, lorsqu’une femme appelle en disant : « Mon mari m’a frappée, je suis dehors », un taxiteur va chez elle accompagné d’un/e assistant/e social/e pour l’emmener et l’orienter vers une pension de famille ou un hôtel conventionné avec le département.

Cette femme pourra rester une semaine dans cet hôtel ou pension, et sera prise en charge par un/e assistant/e social/e. Le dispositif social du Conseil Général se met ensuite en marche pour lui trouver une place dans un foyer d’hébergement, ou l’accompagner dans ses démarches tant qu’elle restera dans cet hôtel – soit un maximum de trois mois. Parallèlement, le département met à disposition des locaux, des relais familiaux ouverts aux femmes qui ont des enfants, pour permettre à la famille, pendant cinq ou six mois, de reprendre une vie normale, avec une équipe médicale, un/e psychologue, etc. Souvent ces familles restent là pendant plus d’un an, le temps de se reconstruire psychologiquement, et de retrouver un emploi. Car la difficulté consiste aussi à retrouver un emploi, et/ou une identité de femme construite : ce sont des femmes détruites qui arrivent avec leurs enfants.

Ce sont ensuite des relais qui permettent à ces femmes de retrouver un logement. Un partenariat a en effet été signé avec l’ADI, l’Agence Départementale d’Insertion, pour aider les femmes rmistes après leur départ de la maison familiale. En effet, quand le conjoint violent garde l’appartement, trouver un nouveau logement est difficile, surtout auprès des bailleurs sociaux. L’Agence Départementale d’Insertion prend alors en charge les 3 premiers mois de loyer.

Le Département a aussi un bon partenariat avec les services de l’Etat. Dès 2008, l’Etat passera des conventions avec les bailleurs pour qu’un quota de logements soit réservé aux femmes victimes de violences. Le 1er bilan de cette action du Département est largement positif. Mais il faut encore aller au-delà.

Formation de la police et des professionnel/les de la justice

Le Conseil Général et l’Etat financent la formation de la police, de la gendarmerie et des professionnel/les de la justice. Une convention a déjà été mise en œuvre sur les 3 derniers mois et sera reconduite en 2007. L’objet de cette convention est la mutualisation des actions de formation menées par le Département et l’Etat.

Sensibilisation et information du public

Un budget très conséquent a été imputé à la communication dans le but de nous permettre d’entrer dans les familles par le biais de la télévision par exemple. Une grande campagne publicitaire a été mise en œuvre afin que les victimes et les témoins des violences faites aux femmes n’aient plus peur d’en parler. Car en parler, c’est déjà beaucoup.

Arajufa , une association d’aide aux victimes

A la Réunion, une association qui travaille dans le milieu de la justice et siège dans les locaux même du tribunal, Arajufa, vient en aide à toutes les femmes victimes de violence qui ont peu de ressources.

Cette association subventionnée par le Conseil Général aide les victimes au niveau des plaintes et du suivi judiciaire. Elle connaît un succès considérable. Ses avocat/es sont payé/es en vacation par le Conseil Général pour faire en sorte que les plaintes aboutissent. Le problème est qu’il y a de plus en plus de plaintes déposées, et que cela coûte de plus en plus cher.

Arajufa a été inspirée par ce que font les Canadien/nes, et ça marche très bien.

Un besoin de coordination et de cohérence indispensable

Une évaluation du coût des violences faites aux femmes en termes d’action sociale est sur le point d’être réalisée à la Réunion. Il sera ainsi possible de voir au niveau du département l’interaction entre les différentes politiques menées contre l’exclusion, le logement, contre l’enfance maltraitée. Il est nécessaire aujourd’hui de coordonner toutes ces actions.

Propos de Nassimah Dindar, recueillis en novembre 2006